En avant du mot, en avant de la parole est la définition étymologique du mot proverbe. Cela signifierait-il que le proverbe précède le verbe, qui quand il est juste est le véhicule de la pensée ?

Peut-être, on peut y réfléchir.

Quoiqu’il en soit il est la formule « qui exprime un conseil ou une expression vérifiée ».

En voici quelques-uns, africains  bien sûr.

Lorsque tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens.

Au bout de la patience, il y a le ciel.

Si tu as de nombreuses richesses donne ton bien ; si tu possèdes peu, donne ton cœur.

Le borgne n’a qu’un œil, mais il pleure quand même.

Dieu n’a fait qu’ébaucher l’homme, c’est sur terre que chacun se crée.

Lorsque tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où  tu viens.

La langue qui fourche fait plus de mal que le pied qui trébuche.

L’erreur n’annule pas la valeur de l’effort accompli.

On est plus le fils de son époque que le fils de son père.

Ce qui est plus fort que l’éléphant, c’est la brousse.

Que celui qui n’a pas traversé ne se moque pas de celui qui s’est noyé.

C’est au bout de la vieille corde qu’on tisse la nouvelle.

Une pirogue n’est jamais trop grande pour chavirer.

Le feu qui te brûlera, c’est celui auquel tu te chauffes.

Le mensonge donne des fleurs mais pas de fruits.

On le sait ce tableau de Gustave Courbet peint en 1866 fit grand bruit et provoqua un retentissant scandale, effrayant le bourgeois par son audace et sa liberté de trait, pourtant clinique et chirurgical d’où est exclu toute intention pornographique.

Etrange tranche de société que celle qui se scandalise pour une peinture et ne se trouble pas outre mesure devant l’esclavage, les traites de toutes sortes, la misère et les lointaines guerres du monde.

Je ne sais pas comment va agir Jacques Toubon, la personnalité politique chargée par Nicolas Sarkozy d’organiser « 2010 année de l’Afrique » mais une chose est sûre nous devons nous, profiter de cette occasion pour analyser de plus près ce que l’Afrique peut nous apporter, nous autres anciennes puissances coloniales.

Cette photo fera moins de bruit mais vous m’accorderez qu’elle constitue, elle, l’avenir du monde.

Tout d’abord il s’agit de deux jeunes filles au regard de paix et d'espérance qui probablement mettront au monde, et Noires.

C'est donc l' occasion de publier à nouveau une phrase citée précédemment dans l’article le temps d'être .

Une phrase de Anne-Cécile Robert alors journaliste au Monde Diplomatique en 2005 sur laquelle à l’orée de cette " année de l’Afrique" je demande aux Blancs de réfléchir:

« L’Afrique exprime des valeurs et des mentalités « autres » qui pourraient rendre service à un monde au bord du gouffre. Car la bataille pour la diversité culturelle - dont le continent noir constitue un de symboles les plus forts - représente en réalité une bataille pour la survie de l’humanité toute entière ».

Petite silhouette au joli sourire un peu triste tous les matins elle balaie les salles de classe, les couloirs et les bureaux de l’école. Elle vit seule avec ses deux filles, le père étant quelque part en Casamance. Quand je dis que Irène vit seule en fait  c’est à l’africaine, c'est-à-dire que sous le même toit vivent sa sœur jumelle avec aussi deux fillettes et aussi un ex-mari quelque part en errance en Casamance. Il y a là un de ses frères avec sa femme et leur fille et enfin la maman imposante matrone, veuve, dont il semblerait qu’elle tienne les cordons de toutes les bourses de ce petit monde. Le week-end voit arriver un autre frère, menuisier à Dakar.

Jean-Paul, le photographe attitré de l’école n’est pas que photographe, il est aussi couturier. Comme plus je voyage plus je voyage léger quand je suis arrivé j’avais besoin d’un pantalon. Je demande donc à Jean-Paul de m’acheter un métrage de lin - la matière la plus confortable à porter en Afrique – en lui recommandant de laver plusieurs fois le tissu pour qu’il ne rétrécisse pas une fois l’habit réalisé. Je lui confie ensuite un  pantalon dans lequel je me sens bien et une semaine plus tard il me rend les deux. Tout est parfait. L’affaire m’a coûté, matière et façon, 8500 fcfa soit 13 euro.

Hassan est le gardien. Le matin à 7h30 il ouvre les portes : celles des classes et  celle du grand portail en fer, l’entrée. C’est à peu près son seul travail. Le reste du temps il garde. Ou alors il fait du thé. Imposant rituel qui lui prend un temps considérable. Assis sur son tapis à même le sable, inlassablement il verse son thé brûlant de sa théière à son verre et de son verre à sa théière, les deux étant distants d’une bonne trentaine de centimètres. Il faut « aérer » me dit-il. Je sais bien qu’il faut aérer, mais avec lui cela prend une dimension quasi mystique. Il faut « aérer » me répète-t-il un rien buté.
Le résultat est à la hauteur de sa technique sans faille et du temps passé, délicieux.

Pa’Jo, toujours coiffé d’un bonnet de laine, sec et aussi petit qu’un sarment de vigne est le jardinier factotum. Il ratisse la cour de sable, arrose les plantes, devrait  parfois mettre de l’engrais ce qu’il fait rarement et quand il le fait c’est avec une conviction mesurée. Grand ami d’Hassan ils passent ensemble de longues heures à l’ombre, sur le tapis, buvant du thé.

Les autres ce sont Modou, Aliou, Benédicte et Etienne les chauffeurs des cars de l’Institution. Ils sont robustes les gaillards et il faut l’être pour piloter leurs gros engins dans les rues de sable de Saly et des alentours.

Françoise, Margot, Iphigénie, Monique quatre des six cuisinières qui préparent quelques 220 repas de midi pour les très bruyants enfants inscrits à la cantine. Je ne sais pas si vous avez déjà déjeuné à l’intérieur d’un tambour au cours d’une fanfare militaire (ce qui ne serait pas courant) mais on doit avoir les tympans aussi brisés que de prendre son repas à la cantine de l’Institution René Merceron.

Demain matin, petite silhouette au joli sourire un peu triste Irène va venir balayer les salles de classe, les couloirs et les bureaux de l’école.

la cour de l'école

* Prononcez : "chair"


barques à Joal - Sénégal

enfants pygmée - Manasao - Centrafrique

Cheikh Aliou Ndao est un auteur Sénégalais de piéces de théatre, de romans et de poèmes.
En voici un, éblouissant.


enfants à Rutshuru - Nord-Kivu - RDC

A l’Afrique

Flèche figée en  ma mémoire

Afrique

Mon cœur saigne

Sous tes serres depuis l’extrême sud de mon âme

Reçois mes pas sur tes pagnes

Moi l’héritier des Ancêtres d’hier

Afrique

Les toits de tes cases

Griffent le ciel sourd

A l’anxiété de leur misère

Ma prière du matin du soir

Ha ! puiser à pleine main

 L’odeur des manguiers dans la tiédeur de Juin

Sentir le baiser des épis sur les sentiers d’Octobre

Rouler dans l’eau claire

Rien dans le regard de Kaïrée

O mère de initiés


école de brousse - Ourouss - Guinée Conakry

Un an après, rentré depuis peu de Centrafrique et après avoir passé quelque temps avec mes enfants à Paris je me rends chez un de mes frères à Annemasse. Je prends donc un Paris-Genève où l’on vient me chercher.

En traversant la capitale suisse en ces temps de Noël je regarde les vitrines des magasins : « La maison du caviar », « Fred », « Boucheron » -dont le prix de la plus modeste montre suffirait à faire vivre la population d’un village pendant une génération- « Hédiard ».

Je n’étais plus à 6000 kms des chants des danses des sons des djembés mais à quelques stratosphères d’années lumière du sourire des enfants sous-alimentés.