Le ciel comme toujours en Afrique au cœur de la nuit est éblouissant, éclaboussé d’étoiles. Nous marchons joyeusement dans la campagne vide autour de Popenguine, il est 4h du matin.
Retour en arrière.
Ce matin du 24 décembre 2009 un appel de Didier, vétérinaire à la retraite qui vit pratiquement à l’année au Sénégal :
- Que fais-tu ce soir ? Je suis seul, Henriette est en France.
- Rien de spécial. Pourquoi, que me proposes-tu ?
- J’irais bien à la messe de minuit à Popenguine et ensuite on pourrait aller diner dans un restaurant que je connais bien, isolé mais très agréable, sur la plage, « l’écho côtier » ?
Le jeu de mot facile du nom de l’estanco m’ayant enchanté en laissant présager une soirée légère et détendante, je lui donne mon accord.
Popenguine, sur la petite côte à 50 kms au sud de Dakar, est un haut lieu de pèlerinage catholique, un sanctuaire marial. Le choix de Didier se comprenait d’autant plus qu’il n’habite qu’à 15 kms et moi à environ 25, je le retrouve chez lui.
La messe a eut lieu à 22h et vers 23h30 nous dirigeons d’un pas alerte et affamé – 20 minutes de marche dans les dunes sableuses - vers « l’écho côtier » où la patronne, jeune et jolie française déjà fortement alcoolisée à cette heure, décide pour nous de notre menu. On se laisse faire.
Autour de nous quelques touristes en mal d’exotisme se considèrent en territoire conquis. Des touristes ordinaires en quelque sorte. L’ambiance est gaie, parfois un peu trop cotillons peut-être.
La mousse au chocolat terminée, je regarde ma montre : 2h !
- Dis-moi Didier, comment fait-on pour rentrer chez toi ?
- Aucune idée.
Ah !, que j’aime ce genre de réponse incertaine ! Il y a quelque chose de délicieusement troublant à l’entendre, car évidemment aucun taxi à cette heure et à cet endroit n’est présent pour nous ramener : un léger parfum d’aventure se précise…
Optimistes nous décidons de nous rediriger vers la Cathédrale pensant y trouver la voiture salvatrice. Optimisme vite évanoui, aucune trace de taxi aux alentours.
Nous décidons donc de rentrer à pieds, après tout il n’y a qu’une quinzaine de kilomètres. Nous marchons. Quelques gros baobabs endormis et indifférents, sentinelles fantasmagoriques accompagnent nos pas, la marche continue silencieuse ou bavarde.
Quatre ou cinq kms plus loin, insolite et bienvenue, une microscopique boutique perdue est encore ouverte. Nous nous y arrêtons, commandons des cafés et des beignets de crevettes qui nous réchauffent car nous avons froid.
La marche reprend, fatiguée mais toujours joyeuse.
Il est 4h.
Nous marchons toujours, de plus en plus silencieusement dans l’ombre noire de la campagne vide que seuls éclairent les yeux des ancêtres.
Et puis l’improbable se produit, une voiture passe. Nous l’arrêtons. Vingt minutes plus tard nous arrivons chez Didier. Je suis un peu déçu, l’aventure fut trop courte.
Il est 5h.
Avant de rentrer dans la maison je regarde une fois encore le somptueux ciel d’Afrique où les étoiles me font des clins d’œil.
L’aube approche.